Suite à la publication d’un billet sur ex-skf concernant le “façonnage” éventuel des points radioactifs par les services chargés de l’entretien des parc urbains de Tokyo, nous voudrions corriger quelques points et émettre une autre hypothèse, hélas assez peu encourageante pour la suite des évènements de contamination au Japon.
Le curage des fossés, égouts et canalisations
D’après le blog ex-skf citant une association, les services d’entretien du parc concerné auraient régulièrement ôté les boues des égouts et des canalisations du parc afin d’éviter que le parking situé en contrebas ne soit inondé à la suite de fortes pluies. Ces boues auraient été répandues à certains endroits spécifiques du parc créant ainsi de nouveaux points de re-contamination de la radioactivité.
L’équation de base : la radioactivité ne peut être détruite, elle peut seulement être fragmentée
Nous ne pensons pas que les opérations récurrentes de curage aient particulièrement aggravé la situation radiologique du parc ; à notre avis, elles ont seulement participé à la redistribution de la contamination en la rendant peut-être un peu plus apparente, ce qui aura au moins eu le mérite d’attirer l’attention sur l’étendue de la contamination de l’accident, le parc étant situé à 220 km au Sud de l’ex-centrale de Fukushima-Daiichi. La vérité est que l’ensemble des districts Nord de Tokyo ont été assez sévèrement contaminés par les retombées accidentelles et que la dissémination de la contamination est toujours relativement inégale.
La délicate équation des boues en zone urbaine et périurbaine
Contrairement aux zones rurales (1), en zone “urbanisée” (2), les boues sont toujours formées par l’accumulation de poussières de type “urbaine” qui sont, par définition, beaucoup plus “mobiles” que sur un sol naturel, autrement dit elles affichent un temps et une distance de voyage plus grands que sur un sol naturel. Les poussières sont donc brassées par le vent, les pluies, la neige (3) et tendent ainsi à toutes suivre le même chemin et donc a fabriquer les mêmes concentrations au niveau de la voirie. Imaginons un ensemble extrêmement urbanisé comme les faubourgs de Tokyo (parfois 5000 habitants au km2) : quels pourraient être les points de sortie éventuels de la contamination ?
- Une partie petite se fixera au sol (estimation grossière de 20 à 30% sur un sol bitumeux ou cimenté, à documenter)
- Le restant des boues (et donc de la radioactivité particulaire) suivra l’écoulement des ruissèlements au prorata de leurs débits
Si l’on place un parc de 100 hectares comme celui de Mizumoto au milieu d’un gigantesque espace “bétonné” l’entourant, le parc deviendra naturellement l’un des points de fuite des boues urbaines (4). Pis encore, si les réseaux d’assainissement sont saturés comme en cas de très fortes précipitations, les terrains restés naturels en zone urbaine deviendront les seuls points de sortie des lessivages des sols urbains… Le sol naturel concentrera donc la contamination comme une éponge placée au milieu d’un bac d’eau. Maintenant qu’une deuxième ou même que plusieurs phénomènes secondaires de re-concentration locaux brassent de nouveau la contamination au sein du parc lui-même n’est pas impossible, il faut juste garder à l’esprit que le parc ne serait initialement pas aussi touché s’il était situé… à la campagne !
Electronucléaire et urbanisme ne font pas bon ménage
Ne vous êtes-vous jamais demandé pourquoi les centrales nucléaires ne sont pas installées au cœur des grandes agglomérations puisqu’elles sont aussi sûres ? La vérité est que les installations électronucléaires fuient toujours plus ou moins (5) et que leur implantation en zone urbaine, même si elle simplifierait énormément les problèmes de distribution et de transport de l’énergie, provoquerait rapidement des phénomènes de concentration de radioactivité à un point ou à un autre. A la campagne, les installations fuient tout autant mais cela ne se voit pas trop… Et si un accident majeur survient, cela laisse un petit délai pour déplacer des populations de toute façon moins nombreuses.
Un bon exemple de re-concentration à Mizumoto à la jonction du béton et de l’herbe : 3.5µSv/h (source)
(1) Zones majoritairement en sol naturel, faiblement “bétonnée”
(2) Desservies par des “réseaux” (égouts), fortement bétonnées
(3) La neige est fréquente au Japon en saison hivernale
(4) En tenant évidemment compte de la déclivité du terrain
(5) Une certaine radioactivité est tolérée au niveau des installations nucléaires, il est en fait impossible de fixer des limites nulles ou trop faibles ; à noter que le vieillissement des installations aggrave généralement le débit de ces fuites
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