Les médias Japonais s'interrogent sur leur rôle dans une crise nucléaire inédite
Le Mainichi Daily - l'un des principaux quotidiens Japonais avec 6 millions d'exemplaires / jour - publie une série d'articles sur les responsabiltés de la presse Japonaise dans le traitement de l'accident de Fukushima. La question que les journalistes se posent est celle-ci : Avec 7 mois de recul, comment estimons-nous avoir couvert l'événement ? Avons-nous suffisamment informé nos lecteurs afin de les assister dans les décisions qu'ils devaient prendre en termes sanitaires, d'évacuation, d'alimentation... ?
La première partie de l'article évoque le traitement initial de l'information et s'attache à démontrer que les informations fournies à la presse étaient d'autant plus fragmentaires que l'événement semblait important : un journaliste rapporte ainsi le discours surréaliste d'un dirigeant de Tepco qui lui affirmait que l'opérateur n'était au courant de rien dans l'après-midi du 12 mars alors qu'une vidéo sur l'écran du responsable montrait en gros plan le bâtiment n°. 1 qui venait d'être détruit par la première explosion. Il aura fallu ensuite attendre 4 heures pour que l'information soit officiellement annoncée (1).
La désinformation et les retards apportés à la diffusion de l'information commencent donc par là, une inertie originelle de l'information à laquelle les médias ne peuvent rien opposer. Leurs demandes d'accès au site sont d'ailleurs systématiquement rejetées.
Mais le gouvernement et les autorités n'ont pas mieux rempli leur mission de protection des populations en n'observant pas l'accident du même regard que ces dernières ; ils on donc manifestement arbitré dès le début de la crise en faveur d'une minimisation des conséquences directes et indirectes de l'accident.
La deuxième partie s'intéresse aux relevés de radioactivité et à la protection de la population autour du site. La première (3km) puis le seconde zone d'évacuation (20 km) n'étant manifestement pas adaptées, le Mainichi s'est employé à calculer les doses de radioactivité ambiante en cumul annuel - alors que les autorités communiquaient en débits de dose horaire. Les experts scientifiques du quotidien établirent donc une carte de radioactivité inédite basée sur des cumuls de mesures locales. Cette information semblait importante pour tous les non-évacués proches du lieu de l'accident.
Cette évaluation permit par exemple de définir qu'un habitant de Fukushima, ville de 300000 habitants située à 60 Km au N/O du site, donc non évacuée, avait reçu un débit de dose estimé à 1.77 mSv durant la période du 14 au 21 mars. Cette donnée hebdomadaire conduisait donc à une exposition annuelle d'environ 60 fois supérieure à la limite d'exposition annuelle du public (1.5 mSv/an). Le quotidien publia ensuite ces estimations le 23 mars avec quelques explications permettant de comprendre l'enjeu de ces chiffres et de leur interprétation. La réaction ne se fit pas attendre : beaucoup de demandes d'éclaircissement de la part des autorités locales ainsi que quelques commentaires critiques sur le sentiment de panique pouvant s'emparer des habitants de Fukushima à la lecture de ces données brutes. Le MEXT (Ministère de l'Industrie) commença ensuite à publier ce type d'estimation à partir du 25 mars.
Le quotidien regrette toutefois de n'avoir pas compris plus vite la portée de la contamination pour tenter d'avertir plus largement les populations concernées, rôle qui revient théoriquement à des autorités jouant toujours manifestement la carte de la l'édulcoration et de la procrastination de l'étendue et des conséquences de l'accident.
La troisième partie de l'enquête revient sur la contamination des travailleurs intervenant sur le site. Peu après l'accident, des équipes de journalistes commencèrent à interroger les travailleurs de Fukushima. Certains témoignages d'employés de sous-traitants faisaient état de consignes de radioprotection au minimum insuffisantes, au pire inexistantes. Tout travailleur intervenant en zone radioactive doit en effet voir ses données personnelles inscrites dans un registre spécial qui doit être mis à jour régulièrement. Cette obligation ne semblait manifestement pas être remplie au niveau de certains sous-intervenants.
A la suite de la dénormalisation des limites d'exposition par le MEXT (de 100 à 250 mSv/an), l'opérateur surenchérit avec l'idée d'une absence totale de norme sous le prétexte de contraintes d'emploi, ce qui justifia aux yeux des entreprises sous-traitantes le fait de ne pas inscrire les niveaux de dose reçus dans les dossiers personnels des intervenants.
Le Mainichi affirme continuer à se battre pour que les travailleurs intervenant sur le site ne soient pas soumis au bon vouloir des entreprises privées mais suivent strictement le régime normal de travailleurs du secteur nucléaire industriel, catastrophe ou pas.
A suivre pour les parties 4 à 6
(1) Ce délai initial est d'autant plus incompréhensible que l'on sait que l'efficacité des pilules d'iode stable devient nulle 6 heures après l'exposition
Le Mainichi Daily - l'un des principaux quotidiens Japonais avec 6 millions d'exemplaires / jour - publie une série d'articles sur les responsabiltés de la presse Japonaise dans le traitement de l'accident de Fukushima. La question que les journalistes se posent est celle-ci : Avec 7 mois de recul, comment estimons-nous avoir couvert l'événement ? Avons-nous suffisamment informé nos lecteurs afin de les assister dans les décisions qu'ils devaient prendre en termes sanitaires, d'évacuation, d'alimentation... ?
La première partie de l'article évoque le traitement initial de l'information et s'attache à démontrer que les informations fournies à la presse étaient d'autant plus fragmentaires que l'événement semblait important : un journaliste rapporte ainsi le discours surréaliste d'un dirigeant de Tepco qui lui affirmait que l'opérateur n'était au courant de rien dans l'après-midi du 12 mars alors qu'une vidéo sur l'écran du responsable montrait en gros plan le bâtiment n°. 1 qui venait d'être détruit par la première explosion. Il aura fallu ensuite attendre 4 heures pour que l'information soit officiellement annoncée (1).
La désinformation et les retards apportés à la diffusion de l'information commencent donc par là, une inertie originelle de l'information à laquelle les médias ne peuvent rien opposer. Leurs demandes d'accès au site sont d'ailleurs systématiquement rejetées.
Mais le gouvernement et les autorités n'ont pas mieux rempli leur mission de protection des populations en n'observant pas l'accident du même regard que ces dernières ; ils on donc manifestement arbitré dès le début de la crise en faveur d'une minimisation des conséquences directes et indirectes de l'accident.
La deuxième partie s'intéresse aux relevés de radioactivité et à la protection de la population autour du site. La première (3km) puis le seconde zone d'évacuation (20 km) n'étant manifestement pas adaptées, le Mainichi s'est employé à calculer les doses de radioactivité ambiante en cumul annuel - alors que les autorités communiquaient en débits de dose horaire. Les experts scientifiques du quotidien établirent donc une carte de radioactivité inédite basée sur des cumuls de mesures locales. Cette information semblait importante pour tous les non-évacués proches du lieu de l'accident.
Cette évaluation permit par exemple de définir qu'un habitant de Fukushima, ville de 300000 habitants située à 60 Km au N/O du site, donc non évacuée, avait reçu un débit de dose estimé à 1.77 mSv durant la période du 14 au 21 mars. Cette donnée hebdomadaire conduisait donc à une exposition annuelle d'environ 60 fois supérieure à la limite d'exposition annuelle du public (1.5 mSv/an). Le quotidien publia ensuite ces estimations le 23 mars avec quelques explications permettant de comprendre l'enjeu de ces chiffres et de leur interprétation. La réaction ne se fit pas attendre : beaucoup de demandes d'éclaircissement de la part des autorités locales ainsi que quelques commentaires critiques sur le sentiment de panique pouvant s'emparer des habitants de Fukushima à la lecture de ces données brutes. Le MEXT (Ministère de l'Industrie) commença ensuite à publier ce type d'estimation à partir du 25 mars.
Le quotidien regrette toutefois de n'avoir pas compris plus vite la portée de la contamination pour tenter d'avertir plus largement les populations concernées, rôle qui revient théoriquement à des autorités jouant toujours manifestement la carte de la l'édulcoration et de la procrastination de l'étendue et des conséquences de l'accident.
La troisième partie de l'enquête revient sur la contamination des travailleurs intervenant sur le site. Peu après l'accident, des équipes de journalistes commencèrent à interroger les travailleurs de Fukushima. Certains témoignages d'employés de sous-traitants faisaient état de consignes de radioprotection au minimum insuffisantes, au pire inexistantes. Tout travailleur intervenant en zone radioactive doit en effet voir ses données personnelles inscrites dans un registre spécial qui doit être mis à jour régulièrement. Cette obligation ne semblait manifestement pas être remplie au niveau de certains sous-intervenants.
A la suite de la dénormalisation des limites d'exposition par le MEXT (de 100 à 250 mSv/an), l'opérateur surenchérit avec l'idée d'une absence totale de norme sous le prétexte de contraintes d'emploi, ce qui justifia aux yeux des entreprises sous-traitantes le fait de ne pas inscrire les niveaux de dose reçus dans les dossiers personnels des intervenants.
Le Mainichi affirme continuer à se battre pour que les travailleurs intervenant sur le site ne soient pas soumis au bon vouloir des entreprises privées mais suivent strictement le régime normal de travailleurs du secteur nucléaire industriel, catastrophe ou pas.
A suivre pour les parties 4 à 6
(1) Ce délai initial est d'autant plus incompréhensible que l'on sait que l'efficacité des pilules d'iode stable devient nulle 6 heures après l'exposition
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