Il semble bien, d'après l'analyse du The Wall Street Journal de ce jour, que la commission de sécurité nucléaire américaine n'ait disposé dans les tous premiers jours suivant l'accident de Fukushima-Daiichi que de données fragmentaires et incomplètes. Le 16 mars 2011, le Directeur Général de la NRC américaine, Gregory Jackzo, déclarait que si une telle situation s'était produite sur le sol des USA, la commission aurait recommandé une évacuation dans un rayon de 50 miles soit 80 km (1), alors que le Japon n'avait évacué que dans un rayon de 20 km autour du site.
"Il semble que les piscines de Fukushima se soient effondrées !"
Le 16 mars 2011, un officiel de la NRC diffusait l'information suivante lors de la réunion de crise :
JOHN MONAGER (p.62) : "L'explosion [du 15/3] a démoli les murs et la structure de la piscine de désactivation de l'unité n°. 4 qui s'est effondrée approximativement jusqu'au niveau bas du combustible ; ceci induit qu'il n'y a plus aucune chance d'avoir de l'eau dans ce lieu [piscine]."
L'information transmise initialement était, nous le savons maintenant, légèrement exagérée mais ceci aide à comprendre pourquoi la NRC recommandait une zone d'évacuation élargie (2) à ses ressortissants résidant au Japon. Mais le principal enseignement n'est pas là !
Le "brouillard de guerre" de Fukushima
L'information principale révélée par ce "transcript" du 16 mars réside dans le fait que la NRC américaine - sans doute l'organisme de contrôle nucléaire le plus puissant du monde - ignorait pratiquement tout de ce qui se passait effectivement à Fukushima. Son chairman, Gregory Jackzo, dévoilait d'ailleurs le fond de sa pensée en qualifiant la situation à Fukushima comme couverte par un brouillard de guerre (fog of war). Les stratèges verront tout de suite de quoi il s'agit : commencer une campagne sur un terrain inconnu, sans cartographie précise de la zone de combat ni "renseignement", vous apporte un handicap tactique certain. Les autorités Japonaises ne communiquaient pas, l'opérateur parait au plus pressé, toute la chaîne de communication et de commandement de crise japonaise était inopérante ou très peu efficace.
Bref il était évident que la réponse accidentelle des Japonais était absolument défaillante et que cela n'a certainement pas participé à un enchaînement serein des opérations post-accidentelles. Sur place, c'était la panique et 20.000 km plus loin, à Rockville, USA (2), c'était la panique recouverte par un brouillard de guerre.
Commentaire : chaque accident nucléaire sévère - et l'humanité commence à avoir du recul dans ce domaine - a toujours failli à apporter des réponses efficaces dont la première pourrait être une communication de crise claire, rapide, sincère et organisée. Il faut malheureusement, suite à ce nouveau fiasco nucléaire, commencer à se poser dès aujourd'hui la question du prochain accident ; si la NRC devait par exemple se pencher sur une situation accidentelle touchant le seul pays fortement nucléarisé n'ayant pas encore - par les seules lois du hasard - été frappé par une catastrophe majeure (4), la situation ne nous semblerait pas devoir être fondamentalement différente... Lenteurs, mensonges et déclarations lénifiantes seraient bien évidemment au rendez-vous. C'est le constat accablant de la triste réalité nucléaire !
Sources :
Bad data guided U.S. Fukushima call, The Wall Street Journal, 22/02, anglais
NRC Transcripts, mars 2011, anglais
NRC Transcript, day 6, march 16, anglais
(1) Déclaration de Bill Borchardt, directeur des opérations de la NRC le 16 mars 2011 (p.149)
(2) La NRC réfléchissait à cette zone rouge de 80 km autour du site dès le 12 mars et entrevoyait même une possibilité d'évacuation complète de l'île de Honshu (WSJ)
(3) Rockville, Maryland, siège de la NRC
(4) A quel pays fortement nucléarisé n'ayant pas connu "son" accident majeur croyez-vous que fassions allusion ? C'est un simple calcul statistique qui nous le suggère : un accident sévère aura lieu en France un jour où l'autre - si la tendance énergétique nationale ne s'inverse pas !
"Il semble que les piscines de Fukushima se soient effondrées !"
Le 16 mars 2011, un officiel de la NRC diffusait l'information suivante lors de la réunion de crise :
JOHN MONAGER (p.62) : "L'explosion [du 15/3] a démoli les murs et la structure de la piscine de désactivation de l'unité n°. 4 qui s'est effondrée approximativement jusqu'au niveau bas du combustible ; ceci induit qu'il n'y a plus aucune chance d'avoir de l'eau dans ce lieu [piscine]."
L'information transmise initialement était, nous le savons maintenant, légèrement exagérée mais ceci aide à comprendre pourquoi la NRC recommandait une zone d'évacuation élargie (2) à ses ressortissants résidant au Japon. Mais le principal enseignement n'est pas là !
Le "brouillard de guerre" de Fukushima
L'information principale révélée par ce "transcript" du 16 mars réside dans le fait que la NRC américaine - sans doute l'organisme de contrôle nucléaire le plus puissant du monde - ignorait pratiquement tout de ce qui se passait effectivement à Fukushima. Son chairman, Gregory Jackzo, dévoilait d'ailleurs le fond de sa pensée en qualifiant la situation à Fukushima comme couverte par un brouillard de guerre (fog of war). Les stratèges verront tout de suite de quoi il s'agit : commencer une campagne sur un terrain inconnu, sans cartographie précise de la zone de combat ni "renseignement", vous apporte un handicap tactique certain. Les autorités Japonaises ne communiquaient pas, l'opérateur parait au plus pressé, toute la chaîne de communication et de commandement de crise japonaise était inopérante ou très peu efficace.
Bref il était évident que la réponse accidentelle des Japonais était absolument défaillante et que cela n'a certainement pas participé à un enchaînement serein des opérations post-accidentelles. Sur place, c'était la panique et 20.000 km plus loin, à Rockville, USA (2), c'était la panique recouverte par un brouillard de guerre.
Commentaire : chaque accident nucléaire sévère - et l'humanité commence à avoir du recul dans ce domaine - a toujours failli à apporter des réponses efficaces dont la première pourrait être une communication de crise claire, rapide, sincère et organisée. Il faut malheureusement, suite à ce nouveau fiasco nucléaire, commencer à se poser dès aujourd'hui la question du prochain accident ; si la NRC devait par exemple se pencher sur une situation accidentelle touchant le seul pays fortement nucléarisé n'ayant pas encore - par les seules lois du hasard - été frappé par une catastrophe majeure (4), la situation ne nous semblerait pas devoir être fondamentalement différente... Lenteurs, mensonges et déclarations lénifiantes seraient bien évidemment au rendez-vous. C'est le constat accablant de la triste réalité nucléaire !
Sources :
Bad data guided U.S. Fukushima call, The Wall Street Journal, 22/02, anglais
NRC Transcripts, mars 2011, anglais
NRC Transcript, day 6, march 16, anglais
(1) Déclaration de Bill Borchardt, directeur des opérations de la NRC le 16 mars 2011 (p.149)
(2) La NRC réfléchissait à cette zone rouge de 80 km autour du site dès le 12 mars et entrevoyait même une possibilité d'évacuation complète de l'île de Honshu (WSJ)
(3) Rockville, Maryland, siège de la NRC
(4) A quel pays fortement nucléarisé n'ayant pas connu "son" accident majeur croyez-vous que fassions allusion ? C'est un simple calcul statistique qui nous le suggère : un accident sévère aura lieu en France un jour où l'autre - si la tendance énergétique nationale ne s'inverse pas !
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