Le 8 octobre, un prélèvement de sol effectué dans la ville de Yokohama, 250 Km au Sud-Ouest de la centrale de Fukushima-Daiichi révélait la présence de Strontium-90 (200 Bq/kg) et d'autre part, le lien avec l'accident était confirmé par le ratio Cs-134 / Cs-137 de 0.9.
La présence d'autres radionucléides dans l'échantillon vient d'être confirmée après qu'une autre portion de ce dernier ait été confiée aux soins de C. Busby pour une analyse plus poussée. L'activité recherhée était principalement celle de transuraniens (1) Plutonium-240 ou de son descendant actinide (2) l'Americium-241 (3) dont les activités se sont révélées inférieures aux limites de détection.
Par contre, surprise surprise, les prélèvements révèlent une activité importante de Plomb-210 (8400 Bq/kg), ce qui est pour le moins curieux. Voyons pourquoi.
Le Plomb-210 est un des descendants de l'Uranium-238 (l'uranium "naturel"), sa durée de demi-vie est de 22 ans ; ce radionucléide présente donc la particularité d'être principalement d'origine "naturelle" tout comme l'un de ses parents proches, le célèbre gaz Radon-222. N'étant que très peu ou pas produit artificiellement en réacteur, ce n'est donc pas à proprement parler un produit de fission nucléaire aussi on ne s'attendrait certainement pas à le trouver en concentration aussi importante à la suite d'un accident. La concentration "naturelle" en Plomb-210 tourne en général autour de 20 à 50 Bq/kg de sol, l'échantillon représente donc une activité environ 250 fois supérieure à la normale. C'est assez significatif pour mériter que l'on se gratte un peu la tête.
Comme nous avons vu que l'origine d'au moins une partie des radionucléides contenu en dose très importante dans l'échantillon (le Cs-134, 32000 Bq/kg) pouvait être corrélée avec l'accident de Fukushima, il faut tenter d'en déduire l'origine accidentelle d'un phénomène essentiellement naturel. C'est une tâche à la hauteur de l'accident : paradoxale ! On pourrait bien sûr penser à une concentration importante en gaz radon "naturel" dans l'environnement de l'échantillon mais l'activité semble beaucoup trop importante, surtout au niveau d'un échantillon de sol (le radon étant essentiellement présent dans l'air ou dans l'eau).
Essayons une autre hypothèse : le radon-222 est un gaz, il est donc très mobile et possède la particularité de se fixer facilement dans l'eau. Une quantité importante de vapeur contenant du radon pourrait s'être dispersée si au moins une partie du combustible est entrée au contact d'une nappe phréatique riche en Radon. Cette hypothèse tendrait à prouver que les nappes phréatiques situées sous le site auraient été directement affectées par le combustible et que la dernière barrière de confinement - le fameux confinement-béton entourant la seconde cuve PCV - aurait belle et bien été traversée.
Quoiqu'il en soi l'activité importante de Plomb-210 (et probablement d'autres descendants émetteurs Bêta de l'Uranium-238) retrouvée non seulement au Japon mais également les grosses activités "bêta" enregistrées sur la côte Ouest des USA, du Canada à la frontière Mexicaine pourraient trouver dans cette explication une raison à l'explosion récente de leurs concentrations.
Alors, "naturel" le Plomb-210 de Yokohama ? Voire, depuis Fukushima, tout est possible...
(1) Élément dont le nombre atomique est supérieur à celui de l'Uranium (92)
(2) Les actinides sont des radionucléides de structure métallique, l'Actinium étant lui-même un métal lourd
(3) L'Am-241 est particulièrement surveillé du fait de sa radiotoxicité très élevée et de sa durée de demi-vie de 432 ans
Sources :
fukushima-diary, 4/1, Anglais
Dosage du Pb-210 dans les liquides, Subatech
Métrologie du Plomb-210, IRSN, 2009
La présence d'autres radionucléides dans l'échantillon vient d'être confirmée après qu'une autre portion de ce dernier ait été confiée aux soins de C. Busby pour une analyse plus poussée. L'activité recherhée était principalement celle de transuraniens (1) Plutonium-240 ou de son descendant actinide (2) l'Americium-241 (3) dont les activités se sont révélées inférieures aux limites de détection.
Par contre, surprise surprise, les prélèvements révèlent une activité importante de Plomb-210 (8400 Bq/kg), ce qui est pour le moins curieux. Voyons pourquoi.
Le Plomb-210 est un des descendants de l'Uranium-238 (l'uranium "naturel"), sa durée de demi-vie est de 22 ans ; ce radionucléide présente donc la particularité d'être principalement d'origine "naturelle" tout comme l'un de ses parents proches, le célèbre gaz Radon-222. N'étant que très peu ou pas produit artificiellement en réacteur, ce n'est donc pas à proprement parler un produit de fission nucléaire aussi on ne s'attendrait certainement pas à le trouver en concentration aussi importante à la suite d'un accident. La concentration "naturelle" en Plomb-210 tourne en général autour de 20 à 50 Bq/kg de sol, l'échantillon représente donc une activité environ 250 fois supérieure à la normale. C'est assez significatif pour mériter que l'on se gratte un peu la tête.
Comme nous avons vu que l'origine d'au moins une partie des radionucléides contenu en dose très importante dans l'échantillon (le Cs-134, 32000 Bq/kg) pouvait être corrélée avec l'accident de Fukushima, il faut tenter d'en déduire l'origine accidentelle d'un phénomène essentiellement naturel. C'est une tâche à la hauteur de l'accident : paradoxale ! On pourrait bien sûr penser à une concentration importante en gaz radon "naturel" dans l'environnement de l'échantillon mais l'activité semble beaucoup trop importante, surtout au niveau d'un échantillon de sol (le radon étant essentiellement présent dans l'air ou dans l'eau).
Essayons une autre hypothèse : le radon-222 est un gaz, il est donc très mobile et possède la particularité de se fixer facilement dans l'eau. Une quantité importante de vapeur contenant du radon pourrait s'être dispersée si au moins une partie du combustible est entrée au contact d'une nappe phréatique riche en Radon. Cette hypothèse tendrait à prouver que les nappes phréatiques situées sous le site auraient été directement affectées par le combustible et que la dernière barrière de confinement - le fameux confinement-béton entourant la seconde cuve PCV - aurait belle et bien été traversée.
Quoiqu'il en soi l'activité importante de Plomb-210 (et probablement d'autres descendants émetteurs Bêta de l'Uranium-238) retrouvée non seulement au Japon mais également les grosses activités "bêta" enregistrées sur la côte Ouest des USA, du Canada à la frontière Mexicaine pourraient trouver dans cette explication une raison à l'explosion récente de leurs concentrations.
Alors, "naturel" le Plomb-210 de Yokohama ? Voire, depuis Fukushima, tout est possible...
(1) Élément dont le nombre atomique est supérieur à celui de l'Uranium (92)
(2) Les actinides sont des radionucléides de structure métallique, l'Actinium étant lui-même un métal lourd
(3) L'Am-241 est particulièrement surveillé du fait de sa radiotoxicité très élevée et de sa durée de demi-vie de 432 ans
Sources :
fukushima-diary, 4/1, Anglais
Dosage du Pb-210 dans les liquides, Subatech
Métrologie du Plomb-210, IRSN, 2009
La croûte terrestre contient naturellement des activités issues de l'une des chaines de l'uranium ou du thorium http://fr.wikipedia.org/wiki/Cha%C3%AEne_de_d%C3%A9sint%C3%A9gration#Famille_4n_.2B_3_de_l.27uranium.C2.A0235_.28plutonium.C2.A0239.29
Rédigé par : deedoff | 06/01/2012 à 00:41
L'activité moyenne en U-238 et donc en Pb-210 est d'environ 40 Bq/kg dans l'écorce terrestre. Nous sommes loin de ce chiffre dans l'échantillon de Yokohama (250 fois plus) ainsi d'ailleurs que sur les activités Bêta globales relevées par certaines balises du réseau Radnet aux USA (certains approchent les 1000 CPM).
Une activité de 8400 Bq/kg de Pb-210 signifie d'autre part que chaque descendant de l'U-238 ainsi que ce dernier présentent une activité similaire (activité séculaire) aussi l'activité totale de l'échantillon équivaut en fait à environ 14 fois ce chiffre (1 par descendant) soit environ 120000 Bq/kg plus bien sûr les autres chaînes de désintégration, les radio-césiums (70.000 Bq/kg, etc.).
http://atomicwiki.org/Les_mines_d'uranium_en_France
Rédigé par : trifouillax | 06/01/2012 à 15:26
Compte tenu de la géologie du Japon, l'hypothèse que des solutés issus d'un corium ayant percé le radier à Fukuskima puissent migrer latéralement de 250 km si rapidement (1 an), via des nappes phréatiques interconnectées, est peu réaliste, pour ne pas dire plus.
Deux solutions restent :
1 - Ça vient d'en haut, et c'est lié à Fukushima, mais alors on se demande pourquoi il n'y a pas d'autres radionucléides liés à l'accident;
2 - C'est naturel. S'il s'agit d'une concentration naturelle, rien ne sert d'en appeler à la concentration moyenne dans les sols, il faut trouver le phénomène à l'origine de cette concentration. Vous dites que le radon migre, mais il peut aussi être stoppé par quelques centimètres de terrain argileux et conduire à des concentrations de ses descendants solides beaucoup moins mobiles, tels de pb210. Il faudrait mesurer les descendants du pb210 pour voir si le ratio étaye cette hypothèse.
Rédigé par : Geologue | 06/01/2012 à 18:07
@géologue : Avez-vous remarqué les 71000 Bq/kg de radio-césium (32000 de Cs-134 et 71000 de Cs-137) dans le même échantillon ?
L'hypothèse est effectivement un double changement de phase : radon gazeux en liquide "naturel" puis liquide en gazeux par l'action putative du corium sur la nappe phréatique "chargée".
Je ne serais pas contre de nouvelles définitions sémantiques ou de mignonnes périphrases comme : une cause de contamination "essentiellement naturelle", ce serait très chic après l'affaire "d'arrêt à froid chaud" (j'ai encore remarqué de la vapeur sur une vidéo Tepco très récente de l'intérieur du bâtiment-ex-réacteur n°. 2, de la vapeur froide sans doute ?)
Rédigé par : trifouillax | 06/01/2012 à 21:36
Je pense que les chercheur ont du échantillonner la terre par hasard sur un site voisin d'un griffon d'eau thermale fossile. Le plomb n'a probablement rien à voir avec Fukushima.
Par contre il reste à expliquer l'anomalie béta des rocheuses. Des idées?
Rédigé par : Greenshadow | 07/01/2012 à 22:47
@greenshadow : l'éventualité d'un site de prélèvement chargé naturellement en radon n'est évidemment pas exclue mais l'hypothèse semi-artificielle ne peut l'être non plus. Ceci me rappelle le débat sur les concentrations en radon sur ou à proximité des sites d'extraction, en France comme en Afrique : naturel ou artificiel car "trifouillé" par les petites mains avides de combustible et de bombinettes ?
Il faudrait "creuser" un peu la géologie de Yokohama, un travail de... géologue.
Rédigé par : trifouillax | 08/01/2012 à 13:31
Que le Cs vienne de Fukushima ne me révulse pas : on voit mal de quel autre endroit il pourrait venir, comme tenu de sa période.
Par contre, le Pb 210 tout seul doit certainement venir du coin. Le japon est farci de sources hydrothermales qui dégazent du radon en arrivant en surface, et qui sont riches en descendants de l'Uranium.
Tennez, un article de l'IRSN sur les problèmes de radon dans les villes d'eau : http://www.irsn.fr/FR/base_de_connaissances/librairie/Documents/publications_pour_les_professionnels/IRSN_guide_mesure_radon_thermes.pdf
Un coup d’œil à une carte géologique du Japon montre tout de suite qu'entre Yokohama et Fukushima les aquifères ne sont pas connectés. Donc l'histoire du corium qui en rajoute une couche est à mettre à la corbeille.
C'est difficile de trouver en libre une carte géologique du Japon, à moins de l'acheter sur le site de leur BRGM à eux. Si cela vous intéresse, j'en ai une à petite échelle issue du Teikuku's Complete atlas of Japan.
Rédigé par : Geologue | 09/01/2012 à 19:30
Possibilité d'extraction de minerai d'uranium au Japon,dans l'hypothèse d'une pollution associée en Pb210 :
http://www.oecd-ilibrary.org/nuclear-energy/uranium-2007/japon_uranium-2007-23-fr
C'est peu probable, à moins qu'il n'y ait une usine d'extraction de minerai qui ait été installée dans le coin. Mais je le répète, il y a assez d'hydrothermalisme au japon pour expliques des anomalies de concentration de ce type.
Il faut aussi savoir que les produits de décroissance de la chaine de l'uranium sont des corps chimiques dont les espèces ont des solubilités différentes dans l'eau. Dans le cas d'un gisement qui est lessivé par une nappe phréatique en mouvement, tous les fils ne se déplacent pas à la même vitesse, et peuvent s'arrêter quand les conditions d’oxydoréduction changent.
C'est un grand classique de l'explo. La prospection de l'uranium des gisements de surface se fait en trimballant un cristal de NaI dans un avion. On compte les scintillement qui apparaissent dans ce cristal quand il est frappé par un rayon gamma. Je vous la fait courte, mais des zones à forte émission gamma se révèlent fréquemment être des gisements de produits de filiation en dessous du radon (le bismuth notamment qui est un émetteur de gamma énergique) alors que l’uranium lui même est resté sur place, ou a migré plus loin.
Rédigé par : Geologue | 09/01/2012 à 19:45
@géologue : merci pour cet éclairage, le fait est que le Japon n'a pas la même vision du radon que les USA par exemple, le gouvernement Japonais ne réglemente aucunement dans ce domaine, encourageant même la thérapie par le radon.
http://www.informationhospitaliere.com/actualite-6308-etats-unis-radon-identifie-seconde-cause-cancer-poumon-pourtant-japon-reconnu-ses-vertus-therapeutiques.html
Rédigé par : trifouillax | 10/01/2012 à 09:32
Le Radon222, un beau mensonge du nucléaire : soit disant le radon222 est naturel, seule une infime partie est naturelle, en réalité les contaminations mesurées sont à mettre en rapport direct avec l'industrie nucléaire :
- Radon222 issu autant de la chaine U238 que Pu238 : http://periodictable.com/Isotopes/086.222/Decay2.jpg
- Radon222 militaire, des sources semées dans la nature : http://cryptome.org/0004/nrc070811.htm
- Radon222 civil ou médical, des sources semées dans la nature : http://www.paratonnerres-radioactifs.fr/?tag=radium-226 , http://bit.ly/yMom7l (asn.fr)
Au final ce plomb210 est fort probablement issu des activités de l'industrie nucléaire.
Insister sur l'aspect géologique est de la pure désinformation.
Rédigé par : Ebsa7 | 16/01/2012 à 00:27