L'exemple à suivre : la Belgique et son système de mesure et d'alerte TELERAD
J'en entends déjà rigoler : Oui, la Belgique, petit pays, petits relevés... Eh bien non ! Le système TELERAD permet de visualiser intuitivement à la fois le débit de dose ambiante puis, en cliquant sur l'emplacement de la balise, le graphe correspondant en µSv/h, la "bonne" unité de mesure accidentelle.
Un nouveau clic en bas de page ouvrira un fichier .PDF détaillé intégrant le graphe et les valeurs moyennes relevées 2 fois par jour sur une période d'un mois. On peut juste regretter que, s'agissant d'une valeur moyenne observée sur une période d'environ 12 heures, les pics de radioactivité instantanée soient noyés dans le bruit de fond.
Le réseau Européen de données radiologiques EURDEP : complétement contre-intuitif, et à quel prix ?
Au premier abord, cette page semble idéale : relevés de radioactivité ambiante sur de nombreux pays Européens (33) dans un format de données unique (nSv/h), de nombreuses possibilités techniques, mais voilà : Le site est très lent, l'affichage très lourd, l'interface rustique (euphémisme), la compatibilité de navigation imparfaite (navigateur Opéra).
Bref, après une prise en main pénible nécessitant de de nombreux aller-retours sur le fichier d'aide, un utilisateur moyen arrivera - peut-être - à afficher ses premiers relevés qui apparaîtront sur la carte sous forme de points colorés très peu intuitifs - l'échelle ne se trouvant pas directement sous vos yeux. Le curseur de chargement tournant à l'envers (?), les messages d'erreurs très fréquents (Fonction disponible "très bientôt"), l'utilisation de ce "machin" Européen découragera au plus vite les visiteurs recherchant une information claire et rapidement disponible.
Pourquoi l'information radiologique de la population serait-elle "volontairement" confuse et mystérieuse ?
Après ce rapide tour de quelques systèmes assez peu satisfaisants dans l'ensemble, il est temps de se demander pourquoi on ne peut trouver un regroupement de données de mesure de radioactivité ambiante sur un site unique, présenté de manière claire et intuitive, afin de retrouver facilement et rapidement les informations essentielles ?
Il y a plusieurs réponses à cette vraie question :
1) Les spécificités nationales "politiques" de l'atome, domaine sensible toujours régalien et, malgré quelques volontés de transparence, fragmenté et peu "transversal" (les nuages radioactifs ne s'arrêtent d'ailleurs t-ils pas aux postes-frontière ?)
2) La complexité initiale du domaine des radiations ionisantes, encore augmentée des normes multiples ou plutôt de l'absence de norme, des fragmentations et des cloisonnements du savoir scientifique etc.
3) Une "porte de sortie" bien pratique en cas de gros pépin, une comparaison internationale des radiations mesurées tenant par exemple du parcours du combattant, les populations se référant alors par défaut au discours "officiel" souvent lénifiant voire infantilisant
Un dernier exemple avant d'affronter la jungle du "renseignement" de radioactivité
Prenons le réseau national Teleray et plaçons-le dans une hypothétique situation accidentelle nationale : les utilisateurs, habitués à voir s'afficher des mesures "modestes" en nSv/h, par exemple 170 nSv/h, verront tout à coup les chiffres s'affoler à proximité de la zone accidentelle ; qu'est-ce qu'une valeur affichée de 1548 ou de 23741 nSv/h pourra bien leur signifier ? Pourquoi ne pas éduquer les consultants en affichant par exemple les unités directement en µSv/h, l'unité "accidentelle" la plus logique ?
Ne s'agit-il pas en fait d'une tentative manifeste de "brouillage" des repères tout comme votre grand-mère aura vu sa compréhension des prix se brouiller avec l'apparition de l'Euro ? Le précieux temps passé par le commun des mortels à effectuer une simple conversion d'unités ne pourrait-il pas être employé à autre chose de plus urgent, alors que chaque minute compte, rassembler l'essentiel par exemple ?
Ce système de relevés n'affiche pas les données instantanées. Sachant qu'une prise d'iode stable doit par exemple s'effectuer au plus tôt après un accident éventuel (idéalement 6 heures après les premiers rejets, ce qui ne s'est jamais accompli dans les faits), le délai de mise à jour des données additionné au délai de compréhension et d'interprétation de ces dernières auquel vient s'ajouter quelque retards de communication probables de la part de l'opérateur et de procrastinations nucléaires inavouables de la part des autorités locales et nationales, combien d'heures ou de jours auront-ils été perdus, disons même gachés, dans des circuits d'information aussi retords ?
La transparence nucléaire n'est pas pour demain !
Au terme de ce papier, il faut bien se rendre à l'évidence : le citoyen, à l'heure de l'information "instantanée", valable dans quasiment tous les domaines de la vie courante, ne pourra encore une fois que se baser sur l'interprétation par les autorités d'un degré de risque qu'il voudrait bien, finalement, pouvoir apprécier et gérer lui-même. Le passé nous a montré qu'il y a eu systématiquement des retards "artificiels" de diffusion d'informations après chaque accident nucléaire majeur et je serais prêt à parier mon dernier compteur geiger qu'il en serait exactement de même si un accident se produisait demain aux portes d'une ville moyenne française.
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