Même les appareils électroniques "durcis" ne résistent pas à ces niveaux de dose !
Lors de la première mission d'endoscopie sur l'unité n°. 2, (3) il s'est avéré que l'endoscope industriel utilisé pour tenter de visualiser le niveau d'eau dans le confinement (4) n'avait pas supporté l’exposition pourtant relativement courte à des irradiations de plusieurs dizaines de Sv/h. Certains observateurs estiment d'ailleurs que la première mission a été abandonnée prématurément suite à la dégradation précoce de la caméra.
Or, d'après le Professeur Misawa de l'université de Kyoto, le délai nécessaire pour faire une exploration approfondie du confinement de l'ex-unité n°. 2 serait de 5 ou 6 heures au minimum. Ceci confirme la difficulté supplémentaire liée au défaut de technologie disponible et nous autorise une nouvelle fois à estimer que le Japon se devrait, ne serait-ce qu'en réponse à la large dispersion des retombées radioactives dans la biosphère, solliciter enfin l'assistance internationale la plus large dans le domaine de l’ingénierie nucléaire. Les Japonais ont su partager la radioactivité, ils doivent partager la gestion de ce problème qui est devenu régional - sinon mondial - avec les plus grands spécialistes internationaux disponibles.
Que des complications importantes surviennent avant que les technologies ne soient disponibles "localement" et personne ne pardonnera plus une désinvolture des autorités Japonaises qui est aujourd'hui tolérée ; est-ce vraiment ce qu'elles souhaitent ? L'AIEA ou l'ONU ne pourraient-ils pas prendre enfin en considération la gravité de la situation et exercer une amicale mais ferme pression sur le Japon tout en leur "présentant" - à deux mains - une réponse concertée ?
Il n'y va pas seulement de la durée du chantier mais également de la sécurité du Japon et peut-être bien au-delà
La durée du chantier de désactivation du site, qui était initialement fixée à 40 années, va probablement souffrir de cette nouvelle donne de "technologie indisponible" (5) ; or le temps ne joue pas précisément avec ceux qui prennent ainsi l'accident à la légère depuis une année : la moindre secousse importante ou très proche de la centrale accidentée fera serrer les fesses à plus d'un responsable Japonais, croyez-moi, malgré toutes leurs pensées "positives". Le challenge de retirer le combustible de l'unité n°. 2 semble très, très mal engagé et je ne vous parle même pas des unités n°. 1 et 3 dont l'état en général et celui du confinement en particulier pourraient se révéler bien pires ; on n'en parle pas car ils sont simplement inaccessibles à ce jour.
La principale différence entre Fukushima et Tchernobyl
Ce débat resurgit régulièrement : batailles de chiffres de contamination, de radiations, de doses, de termes-sources, de tonnage de combustible, de technologies... autant de données techniques qui tentent de masquer LA principale différence : les autorités Russes ont "mis le paquet" dès le départ (6), quitte à sacrifier de la viande à REM (7), en faire une priorité nationale, engager les travaux nécessaires avec une volonté et une détermination à la hauteur de l’arbitraire communiste ; alors que les Japonais temporisent, discutent, tergiversent, s'interrogent, procrastinent, quand ils ne regardent simplement pas ailleurs.
Là où il aurait fallu réagir avec la fulgurance et l’opiniâtreté d'un corium en goguette, ils ont toujours réagi avec une lenteur et un recul indignes de leur héritage culturel : Tepco savait dès les premières heures que la situation était désespérée, il aurait fallu réduire à ce moment la chaîne de commandement et prendre au plus vite des mesures radicales sur des confinements que l'on savait condamnés à terme (8). La catastrophe aurait bien sûr été sur le coup bien plus impressionnante en termes d’irradiation instantanée et de retombées immédiates, mais le plus dûr aurait été fait, l'avenir aurait été plus serein, cet avenir qui sera le "présent" offert à nos descendants.
Jouer la montre et surtout, surtout débuter la "réponse liquide" ont été les pires erreurs des Japonais. S'il n'y avait pas eu d'eau, il n'y aurait en effet :
1) Pas eu d'explosion d'hydrogène qui s'est formé par le craquage de l'eau sous l’effet de la fusion de l'alliage des barres de combustible
2) Pas eu d'explosion vapeur qui s'est probablement déroulée au niveau de la chambre de suppression de l'unité n°. 2, dernière barrière radiologique avant le sous-sol (Les Russes avaient asséché les sous-sols)
3) Pas eu plusieurs centaines de milliers de tonnes d'eau et de déchets radioactifs mollement contenus puis dispersés un peu partout
Tous les spécialistes des réacteurs à eau bouillante savaient, dès les premières heures, ce qui allait se passer à Fukushima-Daiichi ; démarrer une réponse alternative, même risquée, même expérimentale, aurait sans doute été préférable à cette situation de catastrophe au ralenti qui n'est pas prête de laisser le cauchemar nucléaire Japonais se terminer.
(1) On se souviendra notamment que Quince II a du être "assisté" à deux occasions lors de sa dernière mission de reconnaissance
(2) 73 Sv/h 5 m au-dessus du radier du confinement et probablement beaucoup dans la partie la plus basse du confinement où une partie du combustible fondu est probablement nichée
(3) 19/1/2012
(4) Qui se trouvait en réalité beaucoup plus bas, quasiment au niveau du pedestal (radier en béton dans lequel le bas de l'ampoule du confinement est scellée)
(5) Notons en passant le superbe euphémisme à la hauteur de l’incompétence - il n'y a pas d'autre terme - de ceux qui annonçaient "maîtriser" le feu de Prométhée
(6) Enfin, n’exagérons pas, il a leur a fallu 2 à 3 jours pour prendre conscience de l'importance de la catastrophe mais, ce palier psychologique franchi, les mesures ont été radicales !
(7) Désolé pour cette expression, cruelle mais si pertinente
(8) Entre autres la réponse explosive mineure (limitée au décapsulage du haut du confinement pour attaquer ensuite "à la Russe", dessus et dessous) ou majeure (vous avez dit : hydrogène ?)
Source Japonaise : Japan Times, 29/3, anglais
Les commentaires récents