Dans sa feuille de route du 17/10, Tepco estime que les rejets gazeux provenant des réacteurs éventrés s'élèvent à environ 0.1 GBq/h, nous en avions parlé hier. Examinons le document de référence d'un peu plus près, voulez-vous (p. 14) ?
Premièrement, ces données ne tiennent compte que du radio-césium or d'autres produits de fission sont obligatoirement relâchés dans l'atmosphère, dont l'Iode-131 qui est toujours repéré actuellement à Tokyo. Deuxièmement, les campagnes de mesures portent sur des durées différentes (1-17 septembre, 3-13 octobre), ce qui ne facilite pas les comparaisons.
Comparons maintenant les données avec celles transmises sur la feuille de route précédente, établie à la date du 20 septembre, nous y constaterons beaucoup d'imprécisions, d'erreurs et de modifications :
Une autre erreur a été corrigée tardivement sur une nouvelle version du document, initialement le point de mesure en mer était donné à 0.7 GBq/h (0.7 Billion)
Examinons maintenant les modifications apportées au niveau du texte explicatif :
Tiens, pourquoi l'ex-réacteur n°.2 voit-il ses rejets gazeux diminuer par 4 en une quinzaine de jours ?
- L'unité de production n°.2 est plus puissante que l'unité n°. 1 (environ 30% de combustible supplémentaire)
- La radioactivité mesurée par les capteurs CAMS D/W est en moyenne de 8 Sv/h sur l'unité 2 contre 3 sur l'unité n°. 3 :
- La température de l'unité n°. 2 est la plus élevée des 3 unités accidentées :
A part quelques modifications dans les débits d'eau injectés (l'opérateur fait joujou avec ses robinets faute de pouvoir intervenir autrement...), aucune modification substantielle dans l'environnement de l'ex-réacteur n°.2 ne semble expliquer pourquoi les rejets gazeux auraient pu être divisés par un facteur de 4 en une quinzaine de jours.
Pour conclure, il semble que diviser le chiffre d'émission de rejets radioactifs sous forme gazeuse par précisément un facteur de 2, après tant de bricolages constatés au niveau des feuilles de route, corresponde plus à un ajustement diplomatique qu'à une réelle amélioration des conditions de contamination sur le terrain.
Les autorités Japonaises doutent d'ailleurs elles-mêmes fortement des données présentées sur la feuille de route
Le secrétaire de la commission d'enquête parlementaire Yasuhiro Sonoda ne s'y est d'ailleurs pas trompé en déclarant au sujet de la levée des mesures d'évacuation :
"Cela sera discuté au jour le jour après avoir constaté que la réalité des progrès de la feuille de route se vérifiera sur le terrain."
Autrement dit, d'après la NISA, le niveau de dose ambiante mesuré à l'extérieur de l'enceinte du site ne devra pas dépasser la limite légale de 1 mSv/an pour lever les mesures d'évacuation, ce qui n'est pas gagné...
Il semble donc que les autorités Japonaises ne croient plus sur parole l'opérateur et se posent désormais certaines questions sur la validité de tout ce que Tepco formule dans sa feuille de route.
Par exemple, le fait que Tepco déclare à la fois que le combustible fondu se soit échappé des cuves pour atteindre le béton sous la cuve de confinement mais soit malgré tout suffisamment refroidi par l'eau injectée plus haut [dans le réacteur] ne semble pas faire l'unanimité à la NISA, un de ses officiels ayant d'ailleurs déclaré : "A partir d’aujourd’hui, nous allons discuter de la validité de cet argument."
En ce qui concerne les chiffres de rejets, la NISA affirme d'ailleurs qu'ils ne sont qu'estimés au niveau de l'unité n°.3, autrement dit il est impossible pour Tepco de mesurer les rejets en partie supérieure de bâtiment car, pour mémoire, l'explosion du 14/3 a totalement détruit la partie supérieure de bâtiment n°. 3 !
Un point pour la NISA ! Les autorités commenceraient-ils à craindre que l'opérateur ne cache quelques Becquerels sous les tapis ?
Mainichi daily, 19/10, Anglais
Physics Forum
Premièrement, ces données ne tiennent compte que du radio-césium or d'autres produits de fission sont obligatoirement relâchés dans l'atmosphère, dont l'Iode-131 qui est toujours repéré actuellement à Tokyo. Deuxièmement, les campagnes de mesures portent sur des durées différentes (1-17 septembre, 3-13 octobre), ce qui ne facilite pas les comparaisons.
Une autre erreur a été corrigée tardivement sur une nouvelle version du document, initialement le point de mesure en mer était donné à 0.7 GBq/h (0.7 Billion)
Examinons maintenant les modifications apportées au niveau du texte explicatif :
Tiens, pourquoi l'ex-réacteur n°.2 voit-il ses rejets gazeux diminuer par 4 en une quinzaine de jours ?
- L'unité de production n°.2 est plus puissante que l'unité n°. 1 (environ 30% de combustible supplémentaire)
- La radioactivité mesurée par les capteurs CAMS D/W est en moyenne de 8 Sv/h sur l'unité 2 contre 3 sur l'unité n°. 3 :
- La température de l'unité n°. 2 est la plus élevée des 3 unités accidentées :
A part quelques modifications dans les débits d'eau injectés (l'opérateur fait joujou avec ses robinets faute de pouvoir intervenir autrement...), aucune modification substantielle dans l'environnement de l'ex-réacteur n°.2 ne semble expliquer pourquoi les rejets gazeux auraient pu être divisés par un facteur de 4 en une quinzaine de jours.
Pour conclure, il semble que diviser le chiffre d'émission de rejets radioactifs sous forme gazeuse par précisément un facteur de 2, après tant de bricolages constatés au niveau des feuilles de route, corresponde plus à un ajustement diplomatique qu'à une réelle amélioration des conditions de contamination sur le terrain.
Les autorités Japonaises doutent d'ailleurs elles-mêmes fortement des données présentées sur la feuille de route
Le secrétaire de la commission d'enquête parlementaire Yasuhiro Sonoda ne s'y est d'ailleurs pas trompé en déclarant au sujet de la levée des mesures d'évacuation :
"Cela sera discuté au jour le jour après avoir constaté que la réalité des progrès de la feuille de route se vérifiera sur le terrain."
Autrement dit, d'après la NISA, le niveau de dose ambiante mesuré à l'extérieur de l'enceinte du site ne devra pas dépasser la limite légale de 1 mSv/an pour lever les mesures d'évacuation, ce qui n'est pas gagné...
Il semble donc que les autorités Japonaises ne croient plus sur parole l'opérateur et se posent désormais certaines questions sur la validité de tout ce que Tepco formule dans sa feuille de route.
Par exemple, le fait que Tepco déclare à la fois que le combustible fondu se soit échappé des cuves pour atteindre le béton sous la cuve de confinement mais soit malgré tout suffisamment refroidi par l'eau injectée plus haut [dans le réacteur] ne semble pas faire l'unanimité à la NISA, un de ses officiels ayant d'ailleurs déclaré : "A partir d’aujourd’hui, nous allons discuter de la validité de cet argument."
En ce qui concerne les chiffres de rejets, la NISA affirme d'ailleurs qu'ils ne sont qu'estimés au niveau de l'unité n°.3, autrement dit il est impossible pour Tepco de mesurer les rejets en partie supérieure de bâtiment car, pour mémoire, l'explosion du 14/3 a totalement détruit la partie supérieure de bâtiment n°. 3 !
Un point pour la NISA ! Les autorités commenceraient-ils à craindre que l'opérateur ne cache quelques Becquerels sous les tapis ?
Les autorités Japonaises vont-elles bientôt venir grossir les rangs des veilleurs de Fukushima ?
Sources :Mainichi daily, 19/10, Anglais
Physics Forum
Bonsoir Trifouillax, lirait ta dernière prose, juste touché par le lien de mon blogodécalé que tu as posé chez toi : merci!!! A force de prendre le problème par tous les fronts on va bien arriver à quelque chose, qui sait? Bonne soirée, Uncas
Rédigé par : Uncas | 19/10/2011 à 21:10
A propos de ce corium dont on parle beaucoup, un lien vers la gazette du nucléaire en 86 : http://resosol.org/Gazette/1986/69_70_03.html
Il s'agit d'une analyse à chaud de l'accident de Tchernobyl, avec des calculs sur ce qui se passe en matière de réactions chimiques exothermiques au contact corium - béton, grâce à un code de calcul (WELCHSL)qui avait été développé avant l'accident.
Rédigé par : Geologue | 20/10/2011 à 10:21
Merci à Géologue pour ce lien très intéressant. Hélas les configurations accidentelles sont si différentes entre les deux événements (Tchernobyl et Fukushima) qu'il semble difficile de tirer ne seraient-ce que des approximations ICB du premier vers le second.
Je fais plus confiance à l'étude ornl qui porte au moins sur la même configuration (BWR GE Mk1) et le même type de scénario (blackout station) : http://www.ornl.gov/info/reports/1981/3445600211884.pdf
La progression du corium à Fukushima se situe peut-être à mi-chemin entre les deux études ? Entre 20 cm/jour et 1 m/heure il y a de la marge ;)
Je note enfin que le papier de la Gazette commence par estimer que les RBMK type Tchernobyl étaient "sûrs". Vraiment ? Je croyais avoir compris qu'ils étaient plutôt instables et peu sûrs de par leur conception "plutogène" nécessité par leur orientation militaire ? A l'opposé de tout ceci, en Allemagne, les autorités ont estimé qu'un réacteur sûr est un réacteur démantelé.
Cordialement,
Trifou
Rédigé par : trifouillax | 20/10/2011 à 12:54
La gazette du Nucléaire est tenue par Madame Sené, physicienne bien connue dans le milieu antinucléaire pour ses positions critiques à l'égard du nucléaire, mais qui ne se permet pas d'approximation scientifique et qui n'est pas catastrophiste, ou juste ce qu'il faut.
Il s'agit d'un article daté, qui a été écrit au moment de l'accident, à une époque où le mur (de Berlin) tenait encore debout, ce qui peut expliquer une méconnaissance des RMBK. Quand à cette histoire de corium, on peut quand même retenir que le problème avait été étudié, puisqu'il existait un code de calcul (allemand en occurrence). D'autre part, les réaction chimiques qui produisent l'hydrogène et celles, exothermiques, qui se passent avec le béton, sont les mêmes qui ont été à l’œuvre au Japon.
Je n'arrive pas à comprendre que l'on puisse penser que le corium puisse s'enfoncer dans le sol au delà de distances métriques. Par contre, j'ai été très intéressé par l'article sur Tchernobyl qui décrivait des excusions de criticité dans celui-ci à la faveur de venues d'eau. Je ne pensais pas que sa géométrie et sa concentration en matières fissiles puissent être suffisantes. J'aurai dû penser aux réacteurs naturels d'Oklo au Gabon.
Rédigé par : Geologue | 20/10/2011 à 14:24
Bonjour Trifouillax,
"Je note enfin que le papier de la Gazette commence par estimer que les RBMK type Tchernobyl étaient "sûrs". Vraiment ? Je croyais avoir compris qu'ils étaient plutôt instables et peu sûrs de par leur conception "plutogène" nécessité par leur orientation militaire ? A l'opposé de tout ceci, en Allemagne, les autorités ont estimé qu'un réacteur sûr est un réacteur démantelé."
Sujet : Pourquoi il n'y avait pas d'enceinte de confinement à Tchernobyl ? UNE CONFUSION TENACE.
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D'après Pharabod et Schapira (Les jeux de l'atome et du hasard, Calmann Lévy), c'est que la conception particulière de cette centrale -pas de cuve enfermant un coeur d'uranium compact- rendait, à priori, toute excursion (explosion) nucléaire et toute fusion (fonte) "impossible" (sécurité intrinsèque).
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Explication : Le coeur de Tchernobyl était un empilement de 1700 tonnes de graphite traversé par près de 2000 tubes de force verticaux de près de 10 cm de diamètre et de 12 m de hauteur.
A l'intérieur de chacun de ces tubes se trouvaient 18 minces crayons d'uranium baignant dans l'eau transférant leur chaleur produite.
C'est cette extrême fragmentation du dispositif -2000 MICRO CUVES EN SOMME- où toute amorce de Pb. sur un des tubes de force (une "micro cuve") se gère facilement, puisqu'elle ne représente qu'1/2000è du coeur total et que toute généralisation est, à priori encore, "impossible", puisqu'on isole la défectuosité du reste, qui persuadait les experts de l'infaillibilité du système.
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Tout le gotha mondial du nucléaire louait ces réacteurs type RBMK. 30 ans de fonctionnement sans histoire !
C'est pourquoi, Boris Semenov, expert soviétique de sûreté et Directeur adjoint (= expertise soviétique reconnue) de l'Agence Internationale de l'Energie Atomique pouvait écrire :
"Le fait qu'il existe plus de mille circuits primaires individuels augmente la sûreté du réacteur ; un accident grave par perte de réfrigérant est pratiquement impossible" (Bulletin de l'AIEA 1983).
Ce RBMK avait bien une faiblesse, due à la modération des neutrons par le graphite (personne n'est parfait...), mais il suffisait de ne JAMAIS le faire fonctionner à bas régime (instabilité structurelle).
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Le 25 avril 1986, menacés (appel de puissance bientôt demandé par Moscou) de devoir reprendre à zéro des mois de difficiles expériences d'amélioration de sûreté, les opérateurs fatigués, pour finir coûte que coûte, s'affranchissaient de l'interdit de la basse puissance et DEBRANCHAIENT le système de sécurité automatique de chute des barres de sûreté chargé de stopper net tout début d'explosion nucléaire du combustible (excursion).
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Bientôt, explosion nucléaire (30% du "combustible", 1000 mégajoules), dont l'énergie est instantanément transférée à l'eau (= pas de détonation), qui explose en se vaporisant immédiatement (250 kg de TNT), suivi par une explosion d'hydrogène (réaction zirconium des gaines/eau).
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(D'après Jean Pierre Pharabod, ingénieur au laboratoire de Physique Nucléaire des Hautes Energies de l'école Polytechnique et Jean Paul Schapira, polytechnicien, Dr; de recherche à l'Institut de Physique Nucléaire d'Orsay)
Amicalement,
Delphin
(Ca y est, mes messages ne sont donc plus bloqués par la machine)
(déjà posté sur Sciences2 Libération)
Rédigé par : Delphin | 20/10/2011 à 17:09
Merci Géologue et Delphin pour ces éclaircissements, et heureux de constater que les commentaires franchissent la barrière technique qui les bloquait récemment.
Bonne soirée,
Trifou
Rédigé par : trifouillax | 20/10/2011 à 19:57
Je tiens à remercier les géologues pour travailler et pour le lien intéressant.
Rédigé par : casino en ligne | 15/11/2011 à 12:22