Tepco vient de publier deux nouvelles photos infrarouge de l'unité n°. 1 et n°. 3 de Fukushima Daiichi effectuées le 15 octobre. Sur le second document, on visualise le confinement de l'ex-réacteur n°. 3 ainsi que la piscine de désactivation en-dessous (Spent Fuel Pool).
S'il est logique et compréhensible que des éléments chauds soient repérés au niveau de la piscine de désactivation qui a souffert le martyre à partir du 14 mars, nous nous interrogeons sur la présence de points chauds similaires au niveau de l'angle N/O de la piscine.
Examinons ces deux parties (1) et (2) légèrement agrandies :
Dans la piscine, nous visualisons nettement une forme allongée présentant une température homogène supérieure à 35° C car, si la piscine est à niveau, une couche de plusieurs mètres d'eau (8m habituellement) filtre évidemment une partie de la température réelle de l'objet qui est estimée depuis l'extérieur de la piscine. Au niveau dimensions, la piscine mesurant environ 12m dans sa largeur et le diamètre de la partie supérieure du confinement environ 10m, si l'échelle des dessins de Tepco est juste et compte tenu de la parallaxe d'un objet probablement disposé verticalement, la longueur approximative de la bouteille rouge est d'environ 2m. Cela semble un peu court pour un assemblage de combustible mesurant environ 4,5m. Notre hypothèse est qu'au moins l'un des assemblages contenus dans la piscine n°. 3 a été à moitié éjecté de son logement ou s'est fractionné suite à l'explosion du 14/3.
Le détail n°.2 est plus difficile à analyser. La partie centrale rouge, comme la bouteille ci-dessus, indique une température quasiment similaire (35°C) et il semble que des parties un peu plus froides (jaune = 27° et vert = 24°) se soient dispersées autour de la barre centrale rouge.
Cet élément ressemble un peu à une banane à moitié épluchée se situant à 2m au Nord de l'angle N/O de la piscine de désactivation.
Notre interprétation est qu'il pourrait s'agir d'un élément d'assemblage de combustible éjecté de son emplacement ; ce dernier se serait ensuite dégradé et désassemblé une fois hors de l'eau. La hauteur corrigée de la parallaxe pourrait correspondre à celle d'un assemblage complet (4,5m). Une chose est sûre : une poutrelle n'a aucune raison d'être plus chaude qu'une autre !
Le phénomène d'éjection d'éléments du coeur se produit quand le conteneur de combustible, réacteur, piscine de chargement ou de désactivation n'est plus refroidi ou que son niveau baisse d'une manière importante et prolongée. Une réaction de radiolyse (1) se produit alors qui décompose l'eau en hydrogène et en oxygène pouvant induire une explosion au sein même du combustible. Ce phénomène en piscine est assez mal documenté pour l'instant, l'hypothèse principale d'un accident de piscine se limitant à ce que les scientifiques appelaient un feu de zirconium. L'accident du réacteur d'essai BORAX SL-1 à Idaho Falls en 1961 en est une bonne illustration : 3 morts dont l'un a été embroché par une barre de contrôle éjectée du cœur super-critique.
Il faut rappeler qu'un accident de piscine n'est pourtant pas à prendre à la légère, le confinement du combustible étant très restreint à ce niveau (gainage des pastilles, gainage des crayons, eau) ; la situation est en outre souvent compliquée par le nombre important d'assemblages stockés dans des piscines souvent à la limite de leur capacité. La disposition des piscines dans les bâtiments réacteur est également sujette à critique : placées en haut de bâtiment réacteur afin de simplifier le chargement / déchargement de combustible, elles souffrent de ce fait plus d'éventuelles contraintes sismiques, présentent des complications d'appoint en eau par des moyens annexes, des difficultés d'accès en cas d'endommagement des bâtiments etc.
En cas de perte totale d'échange thermique, le volume de la piscine devrait théoriquement suffire à assurer un refroidissement dégradé d'une eau qui ne devrait en aucun cas dépasser 35-40° C. Or, lors de l'accident Japonais, il est probable que la structure de la piscine du bâtiment n°. 3 (ainsi probablement que celle du n°. 4) a été affectée par le séisme du 11 mars entraînant une perte probable d'étanchéité ; cette dernière n'aurait été repérée que tardivement par un opérateur confronté à un accident cumulatif touchant différentes unités de production. L'eau de la piscine n°. 3 a ainsi atteint la proximité du point d'ébullition (100° C à la pression atmosphérique) ainsi que la piscine n°. 4 à partir du 13 avril, cette même piscine prenant même feu (sic!) le 14 mars. Les premiers appoints en eau des piscines de désactivation n'auraient été réalisés que tardivement, les 20 et 21 mars (NISA) et le 23 mars pour l'unité n°.3.
Du combustible neuf au sein de chaque piscine de combustible usé
Une information assez peu connue révélée par l'AIEA le 24 mars : chaque piscine de désactivation contenait également du combustible neuf : la piscine n°. 3 en contenait ainsi 52 assemblages alors que celle du n°. 4, dont le coeur avait été déchargé depuis quelques mois... 204 soit plus de 12% !
Documentation :
Le très bon fil sur les piscines de Fukushima sur rpcirkus
IRSN, bulletin AKTIS 9/11 (contient également des informations sur le Corium)
More on Fuku's SFP, All Things Nuclear, 21/3, Anglais
Safety and Security of Spent Fuel Pool Storage, NRCNA, Anglais
(1) Radiolyse de l'eau : décomposition des éléments chimiques de l'eau suite à l'action de rayonnements ionisants importants
Examinons ces deux parties (1) et (2) légèrement agrandies :
Dans la piscine, nous visualisons nettement une forme allongée présentant une température homogène supérieure à 35° C car, si la piscine est à niveau, une couche de plusieurs mètres d'eau (8m habituellement) filtre évidemment une partie de la température réelle de l'objet qui est estimée depuis l'extérieur de la piscine. Au niveau dimensions, la piscine mesurant environ 12m dans sa largeur et le diamètre de la partie supérieure du confinement environ 10m, si l'échelle des dessins de Tepco est juste et compte tenu de la parallaxe d'un objet probablement disposé verticalement, la longueur approximative de la bouteille rouge est d'environ 2m. Cela semble un peu court pour un assemblage de combustible mesurant environ 4,5m. Notre hypothèse est qu'au moins l'un des assemblages contenus dans la piscine n°. 3 a été à moitié éjecté de son logement ou s'est fractionné suite à l'explosion du 14/3.
Le détail n°.2 est plus difficile à analyser. La partie centrale rouge, comme la bouteille ci-dessus, indique une température quasiment similaire (35°C) et il semble que des parties un peu plus froides (jaune = 27° et vert = 24°) se soient dispersées autour de la barre centrale rouge.
Cet élément ressemble un peu à une banane à moitié épluchée se situant à 2m au Nord de l'angle N/O de la piscine de désactivation.
Notre interprétation est qu'il pourrait s'agir d'un élément d'assemblage de combustible éjecté de son emplacement ; ce dernier se serait ensuite dégradé et désassemblé une fois hors de l'eau. La hauteur corrigée de la parallaxe pourrait correspondre à celle d'un assemblage complet (4,5m). Une chose est sûre : une poutrelle n'a aucune raison d'être plus chaude qu'une autre !
Le phénomène d'éjection d'éléments du coeur se produit quand le conteneur de combustible, réacteur, piscine de chargement ou de désactivation n'est plus refroidi ou que son niveau baisse d'une manière importante et prolongée. Une réaction de radiolyse (1) se produit alors qui décompose l'eau en hydrogène et en oxygène pouvant induire une explosion au sein même du combustible. Ce phénomène en piscine est assez mal documenté pour l'instant, l'hypothèse principale d'un accident de piscine se limitant à ce que les scientifiques appelaient un feu de zirconium. L'accident du réacteur d'essai BORAX SL-1 à Idaho Falls en 1961 en est une bonne illustration : 3 morts dont l'un a été embroché par une barre de contrôle éjectée du cœur super-critique.
Il faut rappeler qu'un accident de piscine n'est pourtant pas à prendre à la légère, le confinement du combustible étant très restreint à ce niveau (gainage des pastilles, gainage des crayons, eau) ; la situation est en outre souvent compliquée par le nombre important d'assemblages stockés dans des piscines souvent à la limite de leur capacité. La disposition des piscines dans les bâtiments réacteur est également sujette à critique : placées en haut de bâtiment réacteur afin de simplifier le chargement / déchargement de combustible, elles souffrent de ce fait plus d'éventuelles contraintes sismiques, présentent des complications d'appoint en eau par des moyens annexes, des difficultés d'accès en cas d'endommagement des bâtiments etc.
En cas de perte totale d'échange thermique, le volume de la piscine devrait théoriquement suffire à assurer un refroidissement dégradé d'une eau qui ne devrait en aucun cas dépasser 35-40° C. Or, lors de l'accident Japonais, il est probable que la structure de la piscine du bâtiment n°. 3 (ainsi probablement que celle du n°. 4) a été affectée par le séisme du 11 mars entraînant une perte probable d'étanchéité ; cette dernière n'aurait été repérée que tardivement par un opérateur confronté à un accident cumulatif touchant différentes unités de production. L'eau de la piscine n°. 3 a ainsi atteint la proximité du point d'ébullition (100° C à la pression atmosphérique) ainsi que la piscine n°. 4 à partir du 13 avril, cette même piscine prenant même feu (sic!) le 14 mars. Les premiers appoints en eau des piscines de désactivation n'auraient été réalisés que tardivement, les 20 et 21 mars (NISA) et le 23 mars pour l'unité n°.3.
Du combustible neuf au sein de chaque piscine de combustible usé
Une information assez peu connue révélée par l'AIEA le 24 mars : chaque piscine de désactivation contenait également du combustible neuf : la piscine n°. 3 en contenait ainsi 52 assemblages alors que celle du n°. 4, dont le coeur avait été déchargé depuis quelques mois... 204 soit plus de 12% !
Le combustible MOX utilisé dans l'ex-réacteur n°. 3 présentait en outre la singularité d'être plus énergétique et plus réactif que le mélange UOX "standard."
Documentation :
Le très bon fil sur les piscines de Fukushima sur rpcirkus
IRSN, bulletin AKTIS 9/11 (contient également des informations sur le Corium)
More on Fuku's SFP, All Things Nuclear, 21/3, Anglais
Safety and Security of Spent Fuel Pool Storage, NRCNA, Anglais
(1) Radiolyse de l'eau : décomposition des éléments chimiques de l'eau suite à l'action de rayonnements ionisants importants
Très bonnes observations Trifouillax ! Cette barre (détail n°2) provient manifestement de la piscine.
Rédigé par : Pif | 31/10/2011 à 00:58
Boire la coupe jusqu'à la lie...
En parcourant l'actu, j'ai appris que M. Yasuhiro Sonoda a bu devant les journalistes un verre de cette eau décontaminée qui inondait les soubassements des réacteurs 5 et 6, dont on ne sait plus où la stocker et avec laquelle on arrose les abords de la centrale (pour "éviter les incendies", disent-ils, juste après la saison des pluies).
L'article dit que l'eau est "purifiée"; l'adjectif fait toute la différence.
Malgré tout, cet arrosage à tous vents inquiète; même la presse japonaise s'en est émue. D'où le geste très médiatique de boire un verre de cette eau devant caméras et journalistes.
Yasuhiro Sonoda est "Cabinet Office Parliamentary Secretary"; si je comprends bien, qqchose comme un secrétaire de cabinet ministériel chargé de relations avec le parlement; il n'est pas pas le ministre de l'industrie, encore moins le premier ministre. Ces gens-là envoient leurs subordonnés boire la coupe d'amertume à leur place. Et les subordonnés ne refusent pas, que voulez-vous, il faut bien faire carrière.
Malgré tout, l'acte de M. Sonoda ne convainc pas, même lui:
"When asked if he could wipe away public concern about the water, Sonoda said he drank the water because he was asked to, but he does not think his act can ensure the water's safety.
[u]He added that the best way to do that is with data."
Source NHK: http://www3.nhk.or.jp/daily/english/society.html
Rédigé par : Aimelle | 31/10/2011 à 16:18
En ce qui me concerne, il y a encore loin de la coupe aux lèvres...
Rédigé par : Uncas | 01/11/2011 à 21:21