Révélation de Naoto Kan : Tepco était sur le point d'abandonner le site de Fukushima-Daiichi le 15 mars
Quelques jours après avoir offert sa démission, l'ex Premier Ministre Japonais Naoto Kan a confié ce jour à l'Asahi Shimbun l'incroyable aveu de faiblesse de l'opérateur Tepco : Le 15 mars à 3h du matin, le Ministre du METI (Education et Industrie) Banri Kaieda était contacté par l'opérateur du site accidenté qui lui signifiait ni plus ni moins qu'il était sur le point d'abandonner le site et de laisser les installations livrées à elles-mêmes.
Une initiative lourde de conséquences
M. Kan avait parfaitement compris que cette évacuation équivaudrait obligatoirement à engendrer une réaction en chaîne incontrôlée débouchant sur l'équivalent de plusieurs accidents de Tchernobyl. La situation des réacteurs une fois livrés à eux-mêmes, sans aucun refroidissement ni modérateur, ne pouvait que conduire implacablement vers plusieurs explosions de la magnitude de celle ayant touché la centrale Ukrainienne en 1986.
"Il était parfaitement innaceptable d'évacuer [le site]" poursuit M. Kan, "Il fallait à tout prix reprendre le contrôle de la situation".
Une certaine "indifférence" de l'opérateur Tepco lors des premiers jours de l'accident
M. Kan avoue qu'il n'a toujours pas à ce jour compris pourquoi Tepco, après avoir validé le fait que le site de production était condamné - les premières gouttes d'eau de mer entraînant de facto la mise hors service définitive des réacteurs - semblait à la fois cacher des informations et ne pas répondre spontanément aux injonctions du gouvernement et de la cellule de crise nucléaire.
Le gouvernement intima alors à l'opérateur l'ordre de conserver une cinquantaine de personnes sur place avant de décider d'expédier au plus vite du personnel supplémentaire, équipes d'urgence et ingénieurs, afin de reprendre par tous les moyens un semblant de contrôle sur les réacteurs. M. Kan pensait également, à juste titre, que la présence sur place d'une équipe "publique" de gestion de la crise remettrait de l'ordre et de la cohésion dans ce qui commençait à devenir un beau foutoir "privé" !
D'autres extraits des propos tenus par M. Kan
Chaque membre de la cellule de crise, qu'il appartienne à la Nisa [la très critiquée agence de sûreté Nucléaire Japonaise] ou aux dirigeants de Tepco estimait qu'il était temps de purger les coeurs dont la pression interne commencer à s'élever dangereusement. J'ai alors donné l'ordre en personne aux responsables de Tepco d'ouvrir les vannes de purge. Un peu plus tard, quand j'ai demandé à Tepco ce qu'il en était, je me suis vu répondre : "La manoeuvre [de purge] n'a pas encore été effectuée". Je n'ai reçu aucune explication sur le fait que mes ordres n'aient pas été accomplis.
- Au cours des heures suivantes, j'ai assisté à la première explosion en direct à la télévision, personne sur le site n'a reporté d'explosion y compris dans le rapport suivant de l'opérateur, reçu 50 minutes plus tard.
- La NISA [l'organisme de sécurité nucléaire Japonais] n'a pas fonctionné correctement. L'ampleur d'un tel accident n'a simplement jamais été envisagée.
Le grain de sel de gen4 : Il faut avouer, à la décharge de Tepco, qu'il semble que les évents de purge aient mal fonctionné, les mécanismes peut-être bloqués par la perte d'alimentation électrique ; le système de secours manuel était par ailleurs situé dans une zone exposée à des radiations ionisantes très importantes (source Physics Forum). Toute l'opération de purge d'hydrogène a ainsi été d'un effet très relatif, la preuve tenant dans les explosions successives touchant les différents bâtiments. Si l'opération de purge avait été fructueuse, les éléments gazeux libérés de l'enceinte de confinement auraient théoriquement dû s'échapper vers les cheminées.
Dans les premières heures de l'accident, chacun pensait avant tout à la panique qui devait régner dans les équipes restées sur place. La confirmation de cet état d'esprit se révèle bien dans les révélations - une nouvelle fois bien tardives - de M. Kan. La panique a bien régné en maître, ne serait-ce que quelques jours, et M. Kan a intégré ce fait pour adapter son célèbre discours de fin de mandat : "Le nucléaire n'est pas sûr, le nucléaire n'est plus sûr."
Il s'en est donc fallu de très peu pour que la situation au Japon ne soit bien pire que ce qu'elle est aujourd'hui.
Bonjour.
Merci pour cet article bien complet, je me suis permis de le reprendre en partie sur mon site.
Concernant le "grain de sel à la décharge de Tepco", à mon avis, le problème est surtout qu'ils ont étés pris de court et qu'il ne savaient pas par ou commencer; mais ce que je trouve inquietant c'est surtout qu'on dirait bien que Tepco ne s'implique pas plus que ça...
Rédigé par : Akihabara | 06/09/2011 à 21:59
Bonjour,
C'est vraiment impressionnant ces révélations ! Cela démontre la dangerosité de cette énergie que les hommes sont incapables de maitriser quand un grain de sable se produit. La France ferait-elle mieux ? Certainement pas...
Rédigé par : J'arrête Le Nucléaire | 08/09/2011 à 17:29