Mishio Ishikawa est un ancien Président du JANTI, le Japan Nuclear Technolgy Institute. Retraité, il conseille toujours les autorités dans le domaine de l'énergie nucléaire. Ce n'est pas un anti-nucléaire primaire, loin de là. Il a conseillé ou directement travaillé dans de nombreuses organisations civiles et gouvernementales comme l'AIEA, le METI et le JAERI, le site ou était installé le tristement célèbre réacteur de recherche Japonais de Tokai-Mura.
Stupéfaction sur le plateau TV le 29/4
Le 29 avril sur Asahi TV, M. Ishikawa étonnait l'auditoire présent en présentant une démonstration tendant à prouver que les coeurs des unités n°. 1, 2 et 3 avait fondu à 100%, déclaration reprise - par erreur ? - début juin par la commission gérant l'accident nucléaire et qui est commentée dans un billet récent. Stupéfaction sur le plateau : une "pointure" scientifique osait pour la première fois contredire la version officielle qui reconnaissait juste une fusion "partielle" des coeurs, et encore du bout des lèvres et pas depuis très longtemps !
M. Ishikawa "Tout le combustible a fondu" par JaneBurgermeister
Confirmation par M. Ishikawa de ses premières déclarations sur le site du JANTI
Le 8 août, de nouveaux commentaires de M. Ishikawa sont publiés sur le site du JANTI ; l'auteur persiste dans son appréciation d'une fusion totale des coeurs des réacteurs n°. 1 à 3 :
"En ce qui concerne l'état des coeurs fondus, sur la base des conditions relevées ces derniers mois , je n'attends aucune amélioration dans un futur proche. Il semble toujours impossible aujourd'hui d'atteindre la situation d'arrêt à froid [des réacteurs] et la solidification des coeurs fondus dans le délai annoncé de 3 à 6 mois."
Une puissance résiduelle thermique estimée à environ 1 Mw par coeur
"Ceci est impossible, comme je l'ai déjà expliqué, du fait de la nature même de la décroissance radioactive. Quatre mois après l'accident, la chaleur produite actuellement provient principalement d'éléments radioactifs de longue période de demi-vie. La puissance calorifique qui est estimée à environ un Mégawatt ne décroitra pas beaucoup même 6 mois après l'accident."
"La masse du coeur fondu [corium] doit représenter environ 4 m de diamètre ; imaginez une énergie thermique de quelques milliers de Kilowatts contenue dans le volume représenté par quelques tatamis de salon. Le système de refroidissement actuel largue simplement de l'eau sur le coeur ; l'étape suivante prévoit simplement de faire tourner l'eau dans un circuit fermé qui n'aménera aucune amélioration de performance de refroidissement et donc aucune chance de solidifier le corium."
Trop tard pour un refroidissement "brutal" ?
"Pour stabiliser [le site de] Fukushima, utiliser un refroidissement efficace comme à TMI n'est pas totalement impossible mais il semble bien que la fenêtre d'opportunité soit maintenant close du fait de la contamination importante de l'eau injectée dans le site depuis 4 mois et d'autre part du déficit en informations vitales comme l'emplacement et la disposition des coeurs fondus qui doivent être ciblés par le refroidissement."
"Une autre option est d'utiliser un refroidissement par air. Ceci impliquerait une interruption des opérations actuelles de refroidissement afin de laisser le coeur accentuer sa fusion et qu'il descende sur la partie basse de la cuve de confinement, ceci ayant pour effet d'augmenter la surface d'échange thermique ; à l'issue de cette intervention le refroidissement pourrait être relancé. Il faut bien noter que mettre en oeuvre cette option implique de résoudre plusieurs problèmes techniques et notamment la prévention d'éventuelles explosions de vapeur. Il est possible d'effectuer cette opération en toute sécurité en étant très vigilant et très courageux." [!]
Un statu quo "honteux" ?
"La troisième et dernière option est de ne rien faire de plus : laisser le coeur fondu dans un courant d'eau puis attendre qu'il finisse par se solidifier. Ceci qui pourrait prendre un temps assez long avant que les éléments ne se solidifient. Etant dans un pays qui se dit très fier de son avancée technologique, une telle inaction me semblerait indigne !
"De la manière dont les éléments se déroulent, j'ai pourtant l'impression que c'est la réponse choisie [par les autorités]. Quel que soit le choix final, cette décision affectera très largement le chemin que prendra notre nation pour stabiliser la centrale."
Le grain de sel de gen4 :
L'analyse de M. Ishikawa est exemplaire, d'autant plus qu'elle contredit frontalement celle claironnée par Tepco et les autorités ; il existe par contre une hypothèse selon laquelle les autorités aient malgré tout raison de chosir le statu quo : le combustible fondu ne serait pas localisé dans le confinement mais au-delà, donnée sur laquelle plus personne, y compris les meilleurs scientifiques et les meilleurs techniciens du monde ne pourraient plus intervenir dans un avenir proche.
Il n'existerait simplement pas de solution à ce problème... à l'échelle humaine.
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