Les premières questions qui viennent à l'esprit en analysant ce type de relevé sont celles-ci : Que signifient ces montagnes Russes ? La radioactivité "naturelle" n'est-elle pas plus ou moins une constante ? Pourquoi les valeurs passent-elles soudainement du simple au quadruple ?
La définition de base : La désintégration radioactive
Tout est poison, rien n'est poison, disait Paracelse. De même, tout est radioactif dans la nature mais rien n'est forcément dangereux, tout est une affaire de concentration, de dose. Ah, si l’œil humain pouvait être sensible à la radioactivité, tout comme le sont les capteurs de certains APN ou caméras numériques, la tâche de détecter des niveaux dangereux - c'est bien l'objectif de la radioprotection : Détecter et protéger des sources radioactives dangereuses - serait bien plus aisée !
Hélas nous devons nous en remettre à des artifices et utiliser des capteurs sensibles aux désintégrations radioactives. Nous sommes donc entourés de radionucléides qui peuvent être "naturels" - le gaz radon est le meilleur exemple connu avec une activité massique très élevée de 5.7*10^15 Bq pour un gramme - mais plus généralement consécutifs à l'activité humaine : Essais d'armes atomiques, sources médicales, accidents et fuites du nucléaire civil...
Notre petit capteur va donc se borner à quantifier les désintégrations à proximité immédiate afin d'estimer si l'environnement présente des dangers ou non, selon des normes sanitaires assez définies mais qui peuvent toutefois se voir modifiées en cas de "force majeure". Ainsi au Japon, les autorités ont-elles relevé la limite sanitaire "d'évacuation" par un facteur de 20 suite à l'accident de Fukushima-Daiichi (données CIPR : 1mSv/an). Il est vrai qu'il y avait sûrement un peu de marge de sécurité mais un facteur de 20, quand même, cela force à réfléchir sur la "normalité" des normes...
Quelques notions d'unité de mesure d'activité radioactive
Le graphe d'activité ci-dessus est exprimé en CPM, c'est-à-dire en désintégrations radioactives par minute (Coups Par Minute). Chaque particule contenant des radioéléments et passant à portée de notre capteur (dans notre exemple un tube Geiger-Müller GMT-02 de fabrication Russe) activera ce dernier par ionisation d'un gaz contenu dans une ampoule. Un petit circuit de détection permettra d'obtenir une estimation sommaire des "coups radioactifs" analysés et enregistrés ensuite par un petit logiciel informatique.
L'unité "basique" de mesure brute d'activité radioactive est le CPS/DPS (Coup/Désintégration par Seconde) qui correspond à 1 Becquerel (Bq). Si l'activité est intense, le Bq / CPS sera vite dépassé et l'on pourra utiliser l'ancienne unité : Le Curie ou Ci (Les unités sont toujours de genre masculin mais il s'agit bien ici de rendre hommage aux travaux sur la radioactivité réalisés par Marie et Pierre Curie) qui vaut 3.7*10^10 Bq et qui correspond plus ou moins à l'activité massique d'un gramme de Radium (226Ra).
Le "bruit de fond" radioactifRevenons à notre relevé d'activité et à son "bruit de fond" si étonnant au premier abord. La théorie de la radioactivité nous apprend "qu'un noyau radioactif à autant de chances de se désintégrer qu'une autre similaire". C'est la loterie ou plutôt la roulette atomique : A la roulette, les chances simples (Noir/rouge, Pair/Impair...) ont quasiment le même facteur de probabilité de sortie (P = 18 chances sur 37 = 0.486). Pourtant on constate des séries de 10 "rouge", 15 "pair" d'affilée etc. Il n'y a pas de limite théorique à une série, la probabilité de sortie d'un chance simple étant toujours approximativement d'une chance sur deux.
Le même calcul peut s'appliquer à nos désintégrations : Les noyaux de radioéléments sont par définition
instables c'est à dire qu'ils finiront tôt ou tard par se désintégrer en provoquant un "Coup" mais il n'existe aucune loi qui définit à quel moment précis tel ou tel noyau radioactif va se rendre à cette "évidence" ; Le seul calcul pouvant nous aider est celui des probabilités et des lois statistiques portant sur un grand nombre d'événements de désintégration.
Imaginons que notre détecteur soit à proximité d'une source émettant
en moyenne 100 "méchantes" désintégrations chaque minute soit 100 CPM. Première minute, nous mesurons 100 CPM, la moyenne, exemple "idéal". Deuxième minute, nous mesurons 50 coups soit 50 désintégrations ; Est-ce anormal ? Non car nous aurons relevé 50% de notre moyenne de 100, ou encore 0.5 fois notre moyenne. Troisième minute, 150 CPS, le retard de désintégrations est "rattrapé", nous avons bien 300 désintégrations en 3 minutes soit notre moyenne idéale.
Des exemples de séries de relevés d'activité en CPMVoici un relevé réel de 120 minutes d'activité (2 heures) sur notre capteur
Attention: Les valeurs ne sont pas celle du graphe en tête d'article !21, 16, 15, 19, 13, 29, 19, 12, 19, 8,
24, 12, 19, 19, 18, 19, 26, 16, 13, 18,
22, 20, 25, 20, 17, 19, 23, 17, 14, 13,
25, 23, 28, 15, 20, 20, 20, 12, 12, 18,
16, 26, 15, 28, 20, 20, 24, 13, 12, 17,
26, 16, 14, 21, 18, 19, 11, 13, 17, 26,
19, 22, 14, 15, 21, 20, 21, 14, 18, 16,
14, 29, 17, 17, 13, 19, 22, 12, 18, 22,
16, 20, 21, 17, 23, 17, 14, 27, 18, 16,
16, 19, 20, 17, 15, 18, 21, 28, 15, 19,
26, 22, 36, 26, 18, 13, 23, 23, 20, 18,
15, 20, 18, 17, 18, 21, 16, 23, 24, 21,
- R est un Relevé
- Le nombre de Points de mesure P est de 120
- La valeur Faible F est de 8 CPM (m+10)
- La valeur Elevée E est de 36 CPM (m+103)
- La Somme S de nos relevés est de 21+16+15+... = 2268
- La moyenne M est de S / P = 18.9
- La dispersion ou déviation standard SD de notre échantillon est de 4.62 : racine carrée de (S(R(p)-M)/P)
D'après la loi de distribution statistique normale :- 68.3% des événements (mesures, minutes) seront compris dans l'intervalle M+SD et M-SD soit entre (18.9-4.62)=
14.27 CPM et (18.9+4.62)
23.52 CPM- 95.5% des événements (mesures, minutes) seront compris dans l'intervalle M+(2*SD) et M-(2*SD) soit entre
9.66 CPM et
28.14 CPM
- 99.7% des événements (mesures, minutes) seront compris dans l'intervalle M+(3*SD) et M-(3*SD) soit entre
5.04 CPM et
32.76 CPM
D'après cette loi "Gaussienne", notre relevé de mesure "E" de 36 CPM est au-delà de 3*SD, il est donc considéré comme statistiquement "anormal". Cela ne veut pas dire qu'il ne se produira jamais mais juste qu'il est très peu fréquent et que sa survenue doit amener à se pencher un peu plus sur l'échantillon de mesures. Je dois bien vous avouer maintenant que j'ai un peu "triché" en sélectionnant dans une base de données qui commence à bien se remplir une "anomalie", réelle mais qui ne devrait théoriquement pas "trop" apparaître dans un si petit échantillon de mesures !
La véritable anomalie statistique est-elle ailleurs ?En revenant sur notre série de 120 mesures effectuées sur une période de 2 heures, on remarquera toutefois que le relevé Elevé "E" de 36 CPM se situe donc "au-delà" de la distribution normale alors que le relevé Faible "F", qui n'est, lui, "que" de 8, rentre à l'intérieur de cette même loi avec une déviation standard d'environ 2.2. Si cette "anomalie" se maintient sur un grand nombre de relevés, ce sera peut-être le signe que les quelques "pics" de radioactivité que j'évoquais dans un
précédent article méritent décidément un peu plus d'attention !
Application pratique de la loi de distribution normale à la rouletteUn petit "easter egg" pour les lecteurs qui auront atteint la fin de ce papier sans s'endormir ni changer de site : Savez-vous que la décroissance radioactive trouve une application pratique dans les générateurs aléatoires de jeux de casino ? L'aspect complétement aléatoire de ce type de source de "hasard" est en effet utilisé par plusieurs grands groupes de casinos en ligne pour
simuler le "véritable" hasard - ou s'en approchant - fourni aux tables de jeu. Voilà pourquoi je m'amusais à vous parler de roulette et de probabilités un peu plus haut.
Bons relevés à tous et surveillez bien les anomalies : Le signe d'une dissymétrie prolongée entre -SD et +SD pourrait être le marqueur de "quelque chose" dans l'air, qui méritera que l'on s'attarde un peu sur les mesures et leur interprétation, quoiqu'en disent les autorités de tout crin...
Un calculateur en ligne pour calculer vos SD et vos distributions :
http://www.calculator.net/ . Vous pouvez retrouver les mesures effectuées en direct sur :
http://gen4.dyndns.tv:700/ Attention, machinerie en test, les coupures sont fréquentes ! Votre ISP / FireWall ne doit pas bloquer le port 700 !
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